La persistance des inégalités salariales entre les femmes et les hommes en France

AutorRachel Silvera
Cargo del AutorUniversité de Paris-Nanterre
Páginas127-149
— 127 —
La persistance des inégalités salariales
entre les femmes et les hommes en France
RACHEL SILVERA
Université de Paris-Nanterres
1. INTRODUCTION
En France, aujourd’hui encore, les femmes gagnent environ un
quart en moins que les hommes, tout confondu. Pourtant ce pays
a des acquis en matière d’emploi des femmes, par rapport aux
autres pays du pourtour méditerranéen: leur taux d’activité est
autour de 80%, y compris pour la plupart des mères de famille
(même si à partir du second enfant, l’activité des mères françaises
fléchit et se traduit par davantage de temps partiel); les femmes
restent plus diplômées que les hommes et la part des femmes
cadres ne cesse d’augmenter (elle est de 39%). Pour autant, les
inégalités salariales stagnent.
Pourtant en France, on ne manque pas de lois, d’études sta-
tistiques et d’actions diverses (mobilisations de femmes, de syn-
dicats… comme #8mars15h40 ou encore annonce du gouver-
nement de faire de la question des femmes une grande cause
nationale). Justement, parce qu’il y a de nombreux textes, on
en vient à penser que tout est déjà fait. Grâce à l’arsenal mis
en place, ces écarts seraient appelés à disparaître. Ce ne serait
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qu’une question de patience… Mais, à ce rythme-là, il faudra
attendre 2105!
Cet article présente les principaux résultats de mon ouvrage:
«Un quart en moins. Des femmes se battent pour en finir avec les
inégalités de salaires»1. Il s’agit de proposer trois nouvelles façons
d’aborder les inégalités de salaire.
Tout d’abord, le travail des femmes reste associé au salaire
d’appoint. On sous-entend encore qu’une femme n’a pas besoin
d’un vrai salaire. D’ailleurs, le salaire d’appoint était explicitement
inscrit dans les premières conventions collectives, sous la notion
légale de salaire féminin, jusqu’en 1946. Un retour sur l’histoire
du salaire d’appoint est fort utile, car ce principe, véritablement
supprimé dans les conventions collectives en 1950 (tout au moins
à l’écrit), subsiste dans l’esprit de beaucoup. L’ombre de la famille
traditionnelle plane sur ces débats, y compris au XXIe siècle.
Ensuite, les écarts de salaire ne se limitent pas à une photo
prise à l’instant t. Ils traduisent un parcours professionnel, de
faibles promotions dans le passé, car les carrières sont sexuées:
les hommes obtiennent davantage d’avancements, font davan-
tage carrière. Maria et quelques autres femmes encore peu nom-
breuses ont décidé de ne pas accepter la discrimination dont elles
étaient victimes du fait de congés maternité, d’absences pour
raisons familiales ou simplement parce qu’elles étaient femmes.
Grâce à une méthode éprouvée dans le champ de la discrimina-
tion syndicale, elles ont gagné leurs procès en démontrant que la
carrière était aussi une source de discrimination.
Enfin, même si la part des femmes cadres progresse, la ségréga-
tion professionnelle reste forte en France. Mais on a beau mettre
en œuvre des plans de mixité, ces évolutions sont très lentes. Un
autre moyen d’avancer consiste à revaloriser les emplois à prédo-
1 La Découverte, 2014.

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